vendredi 17 juillet 2015

Nobody Lives Forever (1946, Jean NEGULESCO)

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Nobody Lives Forever (1946)


Réalisation : Jean NEGULESCO
Avec : John Garfield, Geraldine Fitzgerald (Gladys Halvorsen), Walter Brennan (Pop Gruber), Faye Emerson, George Coulouris (Doc Ganson), George Tobias (Al Doyle)

Breaking Good
On retrouve une nouvelle fois ici le personnage bien connu dans les film de l'immédiat après-guerre du vétéran de la seconde guerre mondiale qui revient chez lui et essaye tant bien que mal de reprendre sa vie d'avant et de s'acclimater aux nouvelles donnes.
Mais pour Nick Blake (John Garfield), la vie d'avant est celle d'un escroc. Un escroc renommé de surcroît, ancien gamin des quartiers pauvres de New-York, qui était arrivé au sommet de son "art" lorsque la guerre arriva.

L'originalité de l'histoire c'est que la guerre n'a pas endommagé psychologiquement le personnage joué par John Garfield (à l'instar de John Payne, amnésique dans THE CROOKED WAY, par exemple), elle l'a rendu plus scrupuleux, las et désireux de mener une vie normale.
Plus scrupuleux mais pas couillon non plus. Lorsqu'il arrive chez son ancienne copine (Faye Emerson, chanteuse qui semble être à la tête d'un night club à succès) pour récupérer l'argent qu'il lui avait confié avant son départ, celle-ci lui annonce qu'elle a tout perdu dans un mauvais placement et que le club qu'elle co-dirige ne lui appartient pas. Elle n'est (soit disant) que la représentante du patron (Robert Shayne), qui s'avère être en fait son nouveau jules. Nick ne se laisse pas faire et récupère son argent par la force.

John Garfield n'est pas James Cagney, et on pourra le trouver un peu tendre dans ce rôle de voyou. Cela ne l'empêche pas de corriger son ex juste après lui avoir roulé un patin. Cagney serait passé directement aux mandales, c'est là toute la différence.

Dégoûté, il part avec son pote Al (excellent George Tobias, vu dans Nous avons gagné ce soir, Rawhide, etc) pour Los Angeles où ils retrouvent un vieil ami, Pop Gruber (incarné par Walter Brennan), autre petit escroc des quartiers, qui survit en faisant les poches des poivrots. Mais Nick, dont la réputation d'escroc de grand talent et de Casanova n'est plus à faire, est immédiatement repéré par une bande locale dont le caïd, Doc Ganson (George Coulouris), est au creux de la vague et souhaite se refaire au plus vite en plumant "un pigeon". Il lui manque pour cela une mise de fond et une gueule avenante. A contre cœur, il demande à Pop de le mettre en relation avec Nick/Garfield pour lui proposer le coup : il s'agit d'arnaquer une jeune et riche veuve (Géraldine Fitzgerald) en lui vendant des actions fictives. Bien que d'abord très réticent à reprendre les affaires, Nick se laisse finalement convaincre.

Le hic c'est que Nick ne va pas tarder à tomber amoureux de la belle veuve, ce qui le met irrémédiablement en porte à faux vis à vis de ses associés qui attendent leur part du deal (30% durement négociés).
On ne sait trop comment mais l'ex de Nick (Faye Emerson) débarque à son tour et ne tarde pas à monter ses associés contre Nick pour se venger.

La guerre a tout changé. Nick le truand ne peut vivre éternellement...


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Malgré une ou deux facilités (comme le retour inexpliqué d'Emerson), c'est un très bon script auquel le spectateur a droit. Il est signé du grand W.R. Burnett, écrivain à succès du roman noir (Little Caesar, Quand la ville dort, High Sierra) et scénariste, qui a travaillé notamment pour Huston, Walsh, Wellman (La ville abandonnée, High Sierra, La grande évasion, etc).
Burnett affirmait avoir forgé son style grâce à la lecture assidue des auteurs français : Honoré de Balzac, Prosper Mérimée, Gustave Flaubert, Guy de Maupassant.

La photographie est signée Arthur Edeson, responsable en autres de celle du Faucon maltais ou de Casablanca. On retrouve d'ailleurs la même ambiance (très) brumeuse de l'épilogue de Casablanca. Le soucis c'est que cette photo passe mal dans l'état actuel de la copie assez délavée diffusée sur TCM. Au point qu'on distingue tout juste les personnages dans certains passages filmés dans le brouillard.

Un mot sur le casting qui est excellent, à commencer par Geraldine Fitzgerald (la veuve énamourée). Une femme très gracieuse, fragile et sensible, un peu naïve (mais jamais cruche). L'opposé de la femme fatale blonde et quelque-peu vulgaire incarnée par Faye Emerson. "She's a dish" comme dit George Tobias à John Garfield lorsqu'il l'aperçoit la première fois.

A titre d'anecdote, j'ai cherché en vain, car elle référencée au casting, la trop rare Virginia Patton (vous savez, la belle sœur de George Bailey dans It's a wonderfull life, vue également en jeune mariée dans la magnifique séquence de la curée du Passage du canyon).

Un mot enfin sur Walter Brennan : c'est un immense plaisir de le retrouver ici, une nouvelle fois dans le rôle du bon pote, à ceci prêt qu'il est beaucoup plus sobre (et surtout moins râleur et soupe au lait) que chez Ford ou Capra. C'est son personnage en fait qui fait (presque) tout le boulot dans le film, mais je n'en dirais pas plus pour pas gâcher. Lui et George Tobias (qui se fait passer pour le secrétaire particulier de Nick), sont les deux potes et complices d'un John Garfield qui, s'il n'est pas mémorable dans le rôle, s'en sort très bien. Il constitue un excellent compromis pour incarner à la fois le vilain garçon issu des quartiers et le romantique sensible, façon Gene Kelly, en voie de rédemption.

La mise en scène est fluide et le rythme enlevé. On ne s’ennuie pas un instant. Le spectateur voyage de New-York aux plages de Californie, a droit à de la romance (et notamment une longue séquence romantique -faisant penser à Elle et lui ou même Vertigo- dans une ancienne mission catholique, l'occasion d'évoquer des souvenirs d'ancien combattant d'Italie et d'insister sur le traumatisme de la guerre), du charme du suspense et un peu d'action. Néanmoins, on ne peut pas dire que la réalisation de Negulesco soit éblouissante ou remarquable. C'est impeccable mais toujours discret, sans grands effets.
Une autre séquence est particulièrement réussie: celle du combat de boxe auquel assistent Nick et la riche veuve. Alors que ce dernier se régale devant le spectacle, elle est assise en arrière plan, visiblement pas à sa place et mal à l'aise devant ce spectacle violent et populaire. En un plan, Negulesco suggère le fossé culturel qui sépare les deux amoureux. La scène suivante en rajoute néanmoins une couche en montrant Nick bricoler un avion en papier pour passer le temps devant un concert de Bach.

Au final, Nobody Lives Forever s'avère un très bon cru grâce à un excellent script et un casting impeccable.

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Les assassins de l'ordre (1971, Marcel Carné)

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Les assassins de l'ordre (1971, Marcel Carné)

Jacques Brel est absolument parfait et savoureux dans le rôle du juge chargé de l'instruction d'une affaire impliquant la police dans la mort d'un homme au commisariat, vraisemblablement à l'issue d'un passage à tabac. Le sujet était totalement dans l'air du temps et l'ombre de Mai 1968 plane sur le film.

Le reste du casting est au diapason : Michael Lonsdale (crédité Michel Lonsdale!), Charles Denner, Jean-Roger Caussimon et Catherine Rouvel (Borsalino) ainsi que Roland Lesaffre dont je réalise qu'il était très certainement un acteur fétiche de Carné avec une dizaine de films du réalisateur (Les assassins de l'ordre, Trois chambres à Manhattan, Juliette ou la clé des songes, Thérèse Raquin, L'air de Paris, Les tricheurs, Terrain vague, Les jeunes loups ou La merveilleuse visite, Du mouron pour les petits oiseaux). On aperçoit aussi Katia Tchenko (habillée).
J'ai d'ailleurs trouvé cette page sur Roland Lesaffre sur le propre site de Carné.


Les dialogues sont l'autre (énorme) point fort du film, surtout lorsque c'est Brel ou Denner qui se donnent la réplique.
J'ai noté celui-là, entre autres, mais il y a en beaucoup plus savoureux les uns que les autres (en particulier dans la scène finale) :

Charles Denner/L'avocat : "La lumière, toute la lumière c'est tout ce que je souhaite."
Jacques Brel/Le juge : "Vous l'aurez maitre, vous pouvez compter sur moi, vous risquez même d'être ébloui."

Jacques Brel/Le juge : "Faut-il qu'il y ait deux justices, l'une pour les policiers et l'autre pour les non policiers ?"


Il y a une scène marrante durant laquelle Brel retrouve son fils au commissariat parce qu'on a retrouvé de l'herbe sur lui (en fait glissé dans sa poche par un agent de police). On apprend alors qu'il risque deux ans de prison! Une nouvelle fois, Carné semble beaucoup s'intéresser aux jeunes de cette époque, au travers de scènes autour du fils du juge et d'allusions à des manifestations.
La mise en scène en revanche ne m'a pas emballé. C'est un peu lent et très statique. En outre, la copie 4:3 délavée que j'ai vue ne met vraiment pas en valeur le film (je ne connait pas le format initial).

Une page dédiée au film sur marcel-carne.com :
http://www.marcel-carne.com/les-films-de-marcel-carne/1971-les-assassins-de-lordre/22-images-de-jacques-brel-tirees-de-la-vhs-socai-films/

Quelques critiques d'époques :

L’Aurore

« Charles Dener (…) en avocat du diable fait d’une plaidoirie (…) un petit chef-d’œuvre du genre. Quant à Michel Lonsdale, il a tellement marqué son rôle de commissaire inquiété et inquiétant qu’il sera difficile, désormais, de ne pas faire appel à lui pour camper un tel personnage. Jacques Brel qui cherchait à se définir au cinéma a, je crois, trouvé son équilibre. »

Robert Monange, 11.05.1971



Le Canard enchaîné

« L’immoralité à tirer de ce film excellemment réalisé, c’est que le cirque continue, et les petits juges qui essaieront de tirer au clair des crimes que le pouvoir, la police, les autorités compétentes veulent laisser impunis, se casseront toujours les dents. »

Michel Duran, 12.05.1971



Combat

« Ni démagogie, ni opportunisme : Marcel Carné ne joue pas le contestataire de service, il se contente d’enregistrer un constat poignant, il nous raconte l’aventure exemplaire d’un seul homme, persuadé que ce n’est que d’un mouvement de révolte morale que pourrait venir notre salut (…). Je ne veux pas célébrer ici le baptême d’un Carné gauchiste, je rends simplement hommage à une probité assez rare dans notre société de camarades et copains, bien décidés a toujours convertir leur révolution en fric ! »

Henry Chapier, 07.05.1971



La Croix

« Les Assassins de l’ordre a le ton dépouillé d’une enquête. Par moment, le dialogue ronfle bien un peu et quelques scènes paradent comme au théâtre. Mais les faits s’enchaînent, secs, implacables, mécanique sans bavures, qui d’une séquence à l’autre, noue la tragédie (…). Carné nous donne, avec ce film, l’un des meilleurs de sa carrière, un peu Cayatte, mais sobre, sans racolage, efficace. »

Henry Rabine, 03.06.1971



L’Education nationale

« En dépit des gaucheries du dialogue, cette histoire est admirablement racontée ; le scénario est agencé avec une sûreté parfaite dans les rebondissements, les suspenses, les attentes (…) ; le rythme est sec, précis, d’une clarté constante ; les pièces de l’enquête, les manœuvres, les mouvements tactiques des adversaires s’enchaînent sous nos yeux sans une longueur ni une obscurité. Cet art de la narration, que feignent de mépriser aujourd’hui bon nombre de petits renards à la queue coupée, n’est ni facile, ni inutile. D’autant plus que l’image n’est pas indigne de la composition d’ensemble. Elle traduit les dons biens connus de Carné pour l’évocation des atmosphères (…) ou pour l’interrogation des visages et des regards saisis en gros plan. »

Etienne Fuzellier, 10.06.1971



L’Express

« Si Carné se met à faire du Cayatte, que va devenir Cayatte ? »

[S.N.], 10.05.1971



Le Figaro

« Reconnaissons le bonne facture du film. Sans doute peut-on regretter que le mécanisme dramatique et le style soient par instant assez rudimentaires. Mais l’action progresse d’une démarche franche et sûre. »

Louis Chauvet, 10.05.1971



France Soir

« Si le film a ses faiblesses comme la justice elle-même, il a par ailleurs suffisamment de force courageuse et de pouvoir spectaculaire pour mériter le succès. Marcel Carné a su réunir une distribution parfaite (…). Beaucoup de bons acteurs pour une bonne cause. »

Robert Chazal, 09.05.1971



L’Humanité

« A trop vouloir prouver, on n’établit pas grand-chose. Sauf que Marcel Carné reste courageux, convaincu de ses entreprises. Sauf l’efficacité des pressions qui peuvent s’exercer sur un magistrat essayant d’établir la vérité. Sauf que tout un système défend, couvre, ses pires errements. Sauf aussi que Carné sait conduire ses acteurs jusqu’à les rendre crédibles, même dans d’assez incroyables conditions, aux traits trop grossis et trop soulignés. »

Albert Cervoni, 15.05.1971



L’Humanité Dimanche

« Les Assassins de l’ordre est le procès d’une certaine police, la plus répugnante, parce qu’elle n’agit pas au grand jour. Elle nie ses petites saloperies et ses crimes sordides (…). Si la censure n’intervient pas, c’est parce qu’elle ne peut pas faire autrement. Carné a tout prévu. Rien n’est montré, tout est suggéré. C’est là sa force, son habileté et sa sagesse. L’efficacité vaut parfois mieux que les criailleries désordonnées. »

Samuel Lachize, 17.05.1971



Les Lettres françaises

« Il est bien difficile de porter un jugement objectif et serein sur ce film. D’une part, on se sent enclin à l’indulgence : c’est plutôt un retour en forme du réalisateur après des échecs notoires, l’engagement moral dont témoigne le film suscite naturellement la sympathie. D’un autre côté, l’œuvre relève d’une conception dramaturgique vieillie, l’intrigue est trop habilement ficelée au niveau du spectacle pour que le film soit vraiment dérangeant (…). Le film a des chances de jouer dans le public le rôle pour lequel il a été conçu, sans génie visuel et non sans certaines complaisances dans l’intrigue et le dialogue. Mais enfin, pour l’honneur de notre cinéma, il est bon qu’un tel film ait vu le jour. »

Marcel Martin, 19.05.1971



Le Monde

« Le récit lui-même est surchargé d’épisodes romanesques, sans doutes utiles à la progression dramatique, mais d’une banalité extrême. La révolte, la solitude morale, les crises de découragement du jeune juge, sont décrites au cours de scènes dont le style théâtral souligne fâcheusement le caractère artificiel. La mise en scène de Marcel Carné vise, certes, à l’efficacité, mais les moyens qu’il utilise dressent une barrière entre ses personnages et nous (…). La sincérité est d’ailleurs la qualité dominante de ce film. Elle ne suffit pas toujours malheureusement à palier les défauts de la narration. »

Jean de Baroncelli, 12.05.1971



Le Nouvelles littéraires

« Un film utile. Est utile tout ce qui dénonce les tares de notre temps. L’usage des méthodes dégradantes pour arracher des aveux à un prévenu est une de ces tares (…). Plus que le manichéisme, me gênent, dans Les Assassins de l’ordre, un certain naturel de confection, une certaine aisance préfabriquée, enfin ce qu’on reproche habituellement au théâtre de Boulevard (…). On ne devrait pas avoir de trop grandes exigences esthétiques à l’égard d’une œuvre qui se propose comme fin non pas la délectation mais la prise de conscience, une œuvre qui veut être non un objet de beauté mais un acte. Disons donc que Les Assassins de l’ordre est un excellent Boulevard, sur un thème du plus respectable humaniste. »

[S.N.], 14.05.1971



Le Nouvel observateur

« Attention : il ne faut pas faire des Assassins de l’ordre ce que Carné ne veut pas qu’il soit : un plaidoyer anar ou un brûlot de la revendication gauchiste. La leçon de morale civique, Carné, par la bouche de Brel, nous la donne en clair. Aucune ambiguïté possible : c’est le non à la tyrannie, c’est la sempiternelle et toujours neuve affirmation que le droit prime sur la force (…). En brave ancien combattant de la gauche, Carné rêve. Il rêve des générations réconciliées (…). Il rêve aussi, Carné, d’une justice qui ne défendrait plus (…) une certaine classe, mais l’homme. C’est parce que Carné rêve à voix haute que Les Assassins de l’ordre nous touche. »

Jean-Louis Bory, 10.05.1971



Paris Jour

« On n’avait vu que des films américains ou italiens sur ce sujet délicat. Et on finissait par croire que personne en France ne pourrait l’aborder. Avec Les Assassins de l’ordre, voilà qui est fait. Et bien fait (…). Marcel Carné a le grand mérite de ne pas tomber dans le piège de l’exagération. »

Jacques Flurer, 12.05.1971



Télérama



« Si l’on compare Les Assassins de l’ordre aux grandes œuvres et même aux meilleurs films de Carné, on n’en fera pas un chef-d’œuvre. Mais compare-t-on une enquête journalistique aux chefs-d’œuvre littéraires ? Le principal mérite du film, c’est de poser clairement et sans concession devant l’opinion, une question qui concerne tous les citoyens de ce pays. »

Jean-Louis Tallenay, 23.05.1971



« Le film de Carné est une trop grossière illustration des problèmes à l’ordre du jour évoqués avec un simplisme déconcertant. Il ne nous épargne aucun discours humanitaire et tous les détails sont grossis à la loupe. Personnages-robots, dialogue-massue, interprétation conformiste, tout concourt à la création d’un univers conventionnel et fictif. Une caricature de pamphlet. »

Gilbert Salachas, 23.05.1971



Témoignage chrétien

« Ni plus ni moins que du sous-Cayatte. Tout y est surfait, du dialogue aux situations, tout y est conventionnel, de la construction du récit à la mise en scène. »

[S.N.], 15.05.1971



Valeurs actuelles

« On ne distingue plus rien du créateur qui eut pendant un moment le style le plus personnel, qualités et défauts compris, du cinéma français (…). Marcel Carné assure qu’il a encore beaucoup à dire, et de son propre fonds. Qu’il se hâte alors de l’exprimer, dans une forme élaborée et non empruntée. Car malgré le confiance qu’on lui garde, après un ou deux autres films tels que Les Assassins de l’ordre, on sera bien obligé de conclure que son talent fut trop étroitement tributaire d’une époque, 1936-1945, pour avoir pu survivre à celle-ci. »

Jean Limousin, 24.05.1971

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jeudi 16 juillet 2015

Des Femmes Disparaissent (1959)

Robert se rebiffe !

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Des Femmes Disparaissent (1959)


Réalisation : Édouard Molinaro
Scénario : Gilles Morris-Dumoulin, d'après son roman
Dialogue : Albert Simonin

Petite entorse à la règle stricte du film noir d'origine américaine, un petit mot sur ce polar français d'Edouard Molinaro. Un film que m'avait conseillé Julien Leonard, en double programme d'Un témoin dans la ville, second polar/noir du réalisateur.

Ambiance nocturne (bruits de pas sur le gravier d'une résidence bourgeoise, dans des rues étriquées d'un Marseille surprenant où le linge pend dans les rues), musique jazzy d'Art Blakey (tambours, cordes et cuivres), zooms suggestifs, on est immédiatement happé par un récit qui tient en haleine durant 1h20.

Jeunes Femmes Vieux Messieurs
Le sujet est la traite des blanches. En suivant sa fiancée (la très jolie Estella Blain, vue aux côté de Ventura dans Le fauve est lâché), Béatrice, en route vers un mystérieux rendez-vous, Pierre Rossi (Robert Hossein) se retrouve devant une somptueuse demeure. Soudain, deux individus surgissent et l'assomment. Revenu à lui, il ne tarde pas à découvrir que la maison sert de repaire à un redoutable gang, dirigé par un certain Victor Quaglio et spécialisé dans la traite des Blanches. Bien qu'en mauvaise posture, il se jure de délivrer sa fiancée...

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"Pas d'Embarquement pour Cythère, ce soir nous jouons plutôt La belle au bois dormant".

C'est un festival de dialogues et de gueules (Jacques Dacqmine en tête), de tous ces habitués aux seconds rôles des années 50. Hossein, gueule de loubard, tient le rôle du jeune premier mais ne fait pas le poids face à la véritable attraction du film qui n'est autre que l'immense, le génial Philippe Clay (acteur-chanteur de légende!, quasi-sosie jeune de son comparse Serge Gainsbourg avec qui il a chanté souvent à la télé). Il est le tueur au chewing-gum, homme de main sarcastique et détaché ("je fais juste mon job, rien de personnel, tu comprends") mais implacable, n'hésitant pas à faire fouetter nue Magali Noël parce qu'elle l'a trahie(scène un brin osée pour l'époque je trouve). Magali Noël et Estella Blain apportent une touche érotique bienvenue (juste ce qu'il faut pour les vicelards).

Sexy, brutal et drôle. Un excellent divertissement.

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