samedi 8 mars 2014

Samedi soir et dimanche matin (1960, de Karel Reisz)

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Samedi soir, dimanche matin.. No Future

"Il me reste un peu d'agressivité, pas comme certains"

Avant les punks et avant les Beatles, il y eu donc en Grande-Bretagne les « Jeunes gens en colère ».
Pas un groupe de rock mais une expression de l'époque pour désigner l'état d'esprit de certains jeunes britanniques (auteurs, romanciers ou même acteurs tels que Harold Pinter, Alan Bates ou Peter Shaffer, et par extrapolation des individus dont ils faisaient échos).
Le terme de "jeunes gens en colère" provient de la pièce de John Osborne, La Paix du dimanche "Look Back In Anger" (fan d'Oasis, si tu m'entends), qui connut un gros succès en 1956 et dont le personnage principal est un déclassé social "volontaire". Un film du même titre (Les corps sauvages en français) avec Richard Burton fut réalisé en 1959.

Plus globalement le mot évoque surtout le désenchantement de la Grande-Bretagne d'après-guerre. Comme un écho à la beat generation américaine (elle-même influencé par l'Europe, en particulier Céline).

Albert Finney (dont c'est pratiquement le premier film) incarne ici Arthur, un jeune ouvrier trop conscient de sa condition social et de ses maigres perspectives d'avenir. Pas vraiment communiste (même s'il vote communiste), un peu anarchiste et petit con immoral, mais surtout plein de colère. Pour oublier sa frustration, il se pinte jusqu'à plus soif le samedi soir, taquine les mégères (à l'usine avec un rat crevé ou dans son quartier en tirant à la carabine à plomb sur sa voisine un peu trop commère à son goût) ou s'envoie en l'air avec la femme d'un collègue..

"On se marie et avant qu'on ait réalisé, on crève".

Un (tout) petit air de Rebel without a cause (mais Finney ne fait jamais dans les envolées colériques ou pleurnichardes de James Dean) donc, excepté que l'anti-héros est ici un jeune adulte issu de la classe prolétaire qui a déjà gouté suffisamment à l'avenir qui l'attendait (usine toute la semaine, pub le samedi et le dimanche). Un personnage plutôt antipathique mais le talent d'Albert Finney aidant, on finit tout de même par s'y attacher.
La figure du père est tout autant égratignée. Ici, celui-ci passe ses soirées devant la télévision et n'écoute même pas les sarcasmes de son fils travaillant à la même usine, tant il est hypnotisé par la télévision.

La dernière image est laissé à l'appréciation de chacun : renoncement ou maturité..

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Don't Look Back in Anger!

Ce film constitue l'un des porte-drapeaux du "Free Cinema" anglais qui précéda (ou coïncida) avec les débuts de la nouvelle vague française. Il y a d'ailleurs ici un petit côté Chabrol des débuts il me semble (je pense au beau serge notamment), à la croisée d'un cinéma réaliste ou abrupt et du mélodrame (je pense aussi à Une place au soleil). On se situe de fait dans un entre-deux nostalgique et désabusé loin de l'idéalisme de la période précédente.

L'occasion aussi de découvrir ou se remémorer l'Angleterre d'avant celle que tout le monde connaît (le swinging London, les beatles , deep end, etc). Un monde entre deux époques fortement représentées : la guerre et les sixties. On peut se dire aussi que c'est la vie dont se sont échappés John Lennon et Paul McCartney, pour ne citer qu'eux.

Samedi soir, dimanche matin était d'abord le premier roman d'Alan Sillitoe (La Solitude du coureur de fond ), dont le père était lui-même ouvrier. Pour ceux que ça intéresse (et bilingue), voici un article paru à sa mort.

Karel Reisz, réalisateur britannique d'origine tchécoslovaque, fit également Le Flambeur (1974) avec James Caan, et La Maîtresse du lieutenant français (1981).
La belle Shirley Anne Field qui incarne la petite amie d'Arthur joua dans de nombreux films (dont My Beautiful Laundrette, The Damned et Alfie) ainsi que dans.. Santa Barbara!

Quant à Albert Finney...

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